Ce que je cache derrière mon nom de plume
Et même, pourquoi j'en ai pris un, à l'origine ?
Hello, et bienvenu·e dans cette infolettre intimiste, je m'appelle Bel Lomi et je partage avec toi les coulisses de mon activité d'autrice et mes réflexions du moment ★
Au programme d’aujourd’hui :
Un nom, c’est du marketing
L’ambiguïté de la féminité
Le puzzle de l’image de soi
📼 Avoir un nom trendy, ou pas
J’aime mon nom, pour de vrai. J’aime ses origines, son histoire, et sa sonorité. Mais, parce que je suis illustratrice de couvertures de romans, je sais que tout ce qui est apparaît dessus est autant un élément esthétique que marketing.
Et mon nom n’est pas vendeur. Surtout parce qu’il est italien, et que pour la plupart des gens, il est difficile à écrire et à prononcer. Donc, déjà, pas cool quand on pense aux reviews, chroniques et autres. Je n’avais pas du tout envie de revivre ce que j’avais vécu au collège/lycée, à savoir, des gens qui “se moque” de la prononciation (dans le sens, s’amusent à mal le prononcer, ça peut paraître idiot, mais à la longue, c’est fatiguant) ou pire, de trouver des fautes dans son écriture. Je ne compte même plus le nombre de fois où on m’a demandé : “c’est un ou deux -n, un ou deux -c”.
Ce qui est normal, attention, mais j’avais peur qu’en étant pas là pour encadrer tout ça (puisque les critiques, sur Instagram et les plateformes type Babelio, Goodreads, sont destinées aux lecteurices, et pas à moi ; j’explique mon rapport à la critique dans cet épisode de podcast), les reviews soient pleines de coquilles.
Sauf que comme je l’ai dit, j’aime mon nom et je suis très attachée à mes origines italiennes (même si je ne parle pas italien et que la culture s’est un peu perdue dans ma famille, mais ça, c’est une autre histoire).
💅 L’ambiguïté de la féminité
A cette problématique de conserver un nom italien plus lisible, s’est ajoutée l’envie d’avoir un prénom mixte.
D’un côté, j’avais envie d’afficher être une femme, parce que, dans notre société, c’est un acte politique en soi, tout comme le fait que j’insiste toujours pour être identifiée comme “autrice” et non comme “auteure” pour bien que l’on entende le féminin.
Néanmoins, pour pleins de raisons différentes, j’ai toujours voulu porter un prénom mixte et même si j’adore mon prénom (c’est Blandine, si jamais) je ne me serais jamais posée la question de le changer s’il avait moins marqué mon genre.
C’est paradoxal, c’est clair, je m’en rends bien compte. Vouloir à la fois assumer et dissimuler mon identité féminine.
Tous ses doutes m’ont emmenés à abandonner l’idée de trouver un nom de plume, parce que je ne réussissais pas à trouver quelque chose qui me plaisait et dans lequel j’arrivais à concilier tout ça.
Sauf que.
⚓️ J’ai détesté publier sous mon vrai nom
La sortie de mon premier roman est arrivée plus vite que prévue, et dans le temps qui m’était imparti pour finir l’écriture, faire les corrections édito, la campagne de financement, la communication, etc. je n’ai tout simplement pas eu le temps de trouver un nom de plume. J’y ai réfléchi jusqu’au dernier moment, mais il a bien fallu que je me rend à l’évidence quand mon éditrice s’est mise à préparer la maquette.
Dès que j’ai vu apparaître mon nom sur le haut de la première de couverture, j’ai été déçue. C’était une sensation étrange, très viscérale, irrationnelle, qui faisait que je ne me reconnaissais pas du tout dans ce nom. C’est bizarre, parce que c’est le mien, donc j’en ai l’habitude, et je ne sais pas encore tout-à-fait pourquoi je me suis sentie aussi mal. C’était juste tellement présent que c’était impossible à ignorer.
Le livre a été imprimé, je l’ai vu, d’abord sur une visio de mon éditrice, puis en vrai, et en dehors de la déception globale du rendu dont j’ai déjà parlé cent fois, il y avait toujours, en arrière-plan, cette gêne de voir mon vrai nom. Je crois que quelque part, c’est parce que j’ai honte de ce que je fais et que si j’avais le choix je serais restée complètement anonyme (surtout vis-à-vis de mes proches). Il faut d’ailleurs savoir que quand je me suis lancée sur Instagram, il n’y avait que 2 personnes au courant : mon conjoint et ma meilleure amie. Je ne voulais pas le dire, parce que quand dans mon esprit, si le reste de ma famille, de ma belle-famille ou de mes amis, assistaient à mes échecs (parce que je savais qu’en me lançant en tant qu’artiste indépendante, il y en aurait forcément) iels allaient me juger et me détester. Pas parce qu’iels ne sont pas cool, au contraire, juste parce que cette peur est plus ancrée en moi que l’épave du Titanic dans le fond de la mer.
🎭 Avancer à visage couvert
J’ai compris, avec cette sortie, que j’avais besoin de la protection d’un pseudonyme (agissant comme une armure autour de moi) pour avancer librement dans la création. Un peu comme si en séparant mon identité civile/secrète de mon identité artistique, je me préservais de cette peur du jugement, parce que ce n’est plus Blandine qui écrit, mais un·e alter ego dans laquelle elle peut se fondre et se cacher.
Bon, c’est un peu deep, mais en soi, ça ne règle pas le problème, parce qu’à ce stade, je n’avais toujours pas d’alternative.
Grâce à cette prise de conscience, j'ai compris l'importance de trouver un nom de plume : tant que je n'en aurais pas, je ne serais pas libre d'être moi-même (paradoxe, encore).
Alors, c’est devenu une urgence pulsant dans le fond de mon esprit, et j’ai pris la décision que Nol Vellar serait le dernier texte que je verrais jamais publié sous mon vrai nom. J’ai brainstormé, encore et encore, pour trouver ce nouveau pseudo, qui pour moi, vous l’aurez compris, n’est pas seulement un nom de plume, mais une facette entière de ma personnalité.
🧩 Mettre ensemble les pièces du puzzle
C’est comme ça que j’ai vécu cette recherche. Je me suis posée avec moi-même en identifiant le plus honnêtement possible tous les critères dont j’avais besoin pour me sentir épanouie à travers ce nom :
un prénom mixte + un nom d’origine italienne + quelque chose de court + de simple + de catchy
Et j’ai fini par trouver. Attention, reveal dans 3, 2, 1…
Le nom est arrivé en premier. J’ai choisi Lomi, en référence à la peintre italienne Artemisia Lomi Gentileschi, une artiste baroque dont l’histoire personnelle et artistique est fascinante, et aussi un exemple majeur de lutte féministe. Je vous invite fortement à aller lire son histoire, et admirer son tableau Judith décapitant Holopherne.
TRIGGER WARNING : Attention quand même, car son histoire est liée à de la violence sexuelle, donc prudence si c’est un sujet compliqué pour vous.
Pour le prénom, c’est plus simple puisqu’il s’agit de la contraction de mon premier et second prénom : Blandine + Elisabeth = Bel.
La quête n’a pas été de tout repos, mais je peux maintenant le dire avec fierté : c’est sous le nom de Bel Lomi que je signerai mes prochains textes.
Merci de ton soutien et de ta lecture jusque ici, j’espère que cet épisode t’a plu. J’ai été ravie de partager ça avec toi & on se retrouve le mois prochain pour de nouvelles épopées d’écriture.
Rien qu'avec la ref pour Lomi, t'avais captivé mon coeur !
Hyper intéressant comme article ! J'ai partagé une partie de la même recherche, cherchant un prénom unisexe pour un pseudonyme (alors même que je suis aussi attachée au fait d'être autrice). Au final je ne me reconnaissais pas non plus dans ce nouveau nom... ce n'est qu'en ayant un pseudonyme "mot" que je me suis sentie à l'aise 😌
Longue vie à ta carrière d'autrice et à ton pseudonyme !